Demander de l’aide en temps de crise


Décider de demander de l’aide en temps de crise ?

Quand arrivent les moments difficiles de la vie nous avons tendance à régresser, et à retrouver des comportements de notre enfance. Déjà à l’époque, ils n’ont pas toujours fonctionné, mais souvent nous n’en connaissons pas d’autres alors on y revient comme dans une vieille paire de chaussures tellement faites à notre pied que nous y sommes comme dans des pantoufles. C’est pourtant le moment de s’appuyer sur un regard extérieur qui puisse avec tact et recul dire l’évidence de ce qui se passe. Quand nous faisons partie du problème nous ne voyons plus ce qui est trop proche et trop impliqué. Parfois aussi nous avons honte de notre blessure comme un malade qui n’oserait pas montrer au médecin une blessure d’une partie intime de son corps. Il y a aussi la croyance que de demander de l’aide psychologique signifierait que nous sommes fous ou anormaux. Pourtant tous les êtres humains rencontrent des épreuves et des crises, il y a ceux qui les surmontent sans dommage et sans aide extérieure grâce à leurs ressources et à leur inscription dans le corps social. D’autres qui les surmontent au prix d’un durcissement de leurs émotions. Ceux-là risquent malgré leur courage à ne rien montrer de transmettre une partie de la blessure à la génération suivante. Car ce qui n’est pas traité reste toujours à traiter pour ceux qui suivent et prennent l’héritage. Il est un principe de l’humanité qui veut que ce qui marque le début de choses influe toujours sur la suite des choses. Les enfants élevés dans des temps de crise qui n’aboutissent pas à une résolution suffisamment satisfaisante portent un fardeau qui ne leur appartient pas.

On rencontre communément trois types de situations de crise, cela peut paraître caricatural, mais chacun s’y retrouvera s’il le veut bien :

• "Les sables mouvants" ou l’enfance sans points d’appui. C’est une atmosphère qui s’effiloche, ce que l’on croit stable est en fait mou. Les parents n’ont pas trouvé de consensus éducatif, ils se disputent devant les enfants au lieu de réguler entre eux pour montrer à leur progéniture une ligne unanime. Parfois l’un des piliers déprime, ne traite pas son problème le couple reste englué dans une situation, qui rappelle l’exemple de la grenouille que nous avions en formation de psy. Si vous jetez une grenouille dans un récipient rempli d’eau chaude elle saute et s’enfuit mais si vous la mettez dans l’eau froide et que vous chauffez le liquide très progressivement elle s’habituera à la chaleur et finira par mourir cuite ! Le besoin vital d’adaptation fait que l’on peut s’adapter à vivre le pire.

• Les ruptures brutales déstabilisent et, font perdre des repères comme un décès, un divorce des parents, le départ d’un enfant. Ces ruptures provoquent une carence brutale dans le système relationnel, elles sont souvent très douloureuses mais sont plus faciles à traiter car souvent la cohérence est là ; une fois le processus de deuil accompagné, la vie et la joie reviennent.

• Les traumatismes du type accidents, maladie dans la famille ou encore situations à répétition, qui révèlent que la pathologie ne touche pas seulement les personnes mais le groupe ou le système tout entier.

Face à ces trois grands groupes d’épreuve les réponses ne serons pas les mêmes : pour le premier groupe il s’agira d’apporter à la personnalité un étayage qu’il lui a manqué et lui offrir progressivement les outils qui permettront de se séparer (sauter hors de la marmite pour la grenouille).

Pour les seconds schématiquement ils auront besoin d’être temporairement accompagné comme un blessé qui utilise des béquilles jusqu’à ce que, le deuil terminé, ils retrouvent la joie.

Pour les troisièmes c’est le groupe tout entier qu’il faut traiter. C’est le système qui est malade. Nous savons maintenant que dans un groupe celui qui prend la parole (ou manifeste un symptôme) le fait en son nom propre bien sûr, mais il est aussi le porte-parole du groupe tout entier. En fait dans une famille, un groupe c’est souvent l’élément le plus faible qui porte le symptôme du groupe permettant ainsi aux autres de fonctionner normalement même s’ils souffrent du malaise du plus faible.

La complexité des phénomènes humains fait que parfois ces problématiques se combinent à tel point que ceux qui y sont impliqués se retrouvent dans un brouillard complet pour sortir du labyrinthe. Il n’est pas envisageable de tenter de résoudre en étant partie prenante au risque d’aggraver le problème en apportant sa problématique personnelle à celle du groupe. C’est l’élément qui par sa position de recul apportera un regard qui pourra rompre avec l’ancien système et offrira au groupe (la famille) la possibilité d’inventer une nouvelle forme de fonctionnement allant vers la vie.

F. PAUL-CAVALLIER, psycholthérapeute-formateur auteur de "Accompagner la vie" éd. Médiaspaul. "Visualisation, des images pour agir" InterEditions, Paris. http://www.dunod.com/pages/ouvrages/ficheouvrage.asp ?id=46994 Site Internet http:/www.f.paul.cavallier.free.fr